Au milieu de la nuit il sonne.
Inutile de regarder le numéro: instantanément vous comprenez que c'est maintenant. La voix de l'interne est douce et calme. Elle vous demande combien de temps il vous faut pour venir.
Vous arrivez aux premières lueurs du jour.
Un médecin vous explique que puisque vous êtes là, cette seringue ne sera pas remplacée et qu'ensuite cela ne devrait pas être long.
Vous vous asseyez à côté de lui. Vous prenez sa main et vous lui parlez doucement comme vous n'avez jamais osé le faire. Il semble dormir. Vous avez du mal à détourner votre regard de la machine qui inexorablement enfonce le piston dans la seringue projetant l'adrénaline dans un tuyau en plastique transparent qui en rejoint plusieurs autres venant d'autres machines disposées autour du lit. Il ne reste plus que quelques centimètres.
Maintenant la seringue est vide.
Aussitôt les chiffres affichés sur le moniteur comment à décroître. Doucement d'abord puis la chute s'accélère.
Vous sentez monter en vous une émotion inconnue qui vous déchire. Vous savez seulement que s'ouvre une blessure qui ne cicatrisera jamais entièrement comme on reçoit quelques unes au cours de sa vie.
Les chiffres dégringolent, passent tous à zéro.
Sa main est déjà froide.
C'est fini.
Une infirmière se faufile discrètement entre les appareils pour les arrêter.
Après un long moment vous vous ressaisissez. Vous demandez bêtement ce qui va se passer maintenant. Mais vos pensées sont déjà ailleurs.
Comment allez-vous lui annoncer à elle, enfermée dans sa démence?
Dehors le soleil brille.